- Reset + PDFPrint

"La lecon digitale d'un petit pays balte", Enjeux Les Echos

05.09.2013

Frédéric Filiaux


A tous ses confrères chefs d'Etat, Toomas Hendrik Ilves dispense – à son corps défendant – une leçon de politique publique dans le domaine du numérique.

L'exemple ne pouvait venir que d'une démofralie à la lois réeenle el minuscule, en IbccuiTcnco la république halte d'Lstonie (1,4 million d'habitants). Avec un pragmatisme forcené, le président Ilves en a fait un des avant-postes de l'Europe digitale, avec des inventions comme Skvpe ou Kazaa, ou encore une expertise en matière de sécurité informatique qui a fait de l'Estonie la référence dans ce domaine (l'Otan a installé à Tallinn son centre de cybersécurité).

En 1991, l'Estonie sortait tout juste de quarante-cinq années d'hiver kommuniste qui avait gelé mentalités et infrastructures. Le jeune Toomas Hendrik Ilves fait partie dè cette élite formée à l'étranger qui va saisir à bras-le-corps l'opportunité historique d'une modernisation décisive du pavs. Lui et l'équipe gouvernementale qu'il vient d'intégrer vont prendre une série de décisions d'importance. La première porte sur lapprentissage de l'informatique à l'école, puis sur les équipements. « Par exemple, le standard de la v ille de Tallinn datait de... 1938. Nos voisins suédois nous ont proposé dc nous olfrir des commutateurs analogiques. Jai poliment refusé et arrangé lachat de centraux numériques de dernière génération partout où c'était nécessaire», iiie raconte le président estonien.

Le premier service en ligne mis en place est la collecte des impôts. Lnivrés par celle modernité nouvelle, les contribuables se ruent dans les kiosques numeriques pour paver leur dû; la collecte bat des records, du coup la fonction publique est définitivement convaincue des bien – faits d'un Etat numérique. S'ensuit l'informatisation complète du système de santé avec une carte Vitale comme on en rêverait, puisqu'elle contient l'essentiel du dossier médical de l'individu, son historique, ses ordonnanees et les codes d'accès à tout ce qui le concerne – au contraire de la France où certains éléments portent la mention « Ne pas montrer au patient » Un système tellement efficace qu'il a été adopté par les pavs scandinaves limitrophes.

Mais l'arme absolue sera la création d'une carte d'identité nationale numérique sen ant à toutes les démarches. « Nous avons vite compris que l'Etat devait cire le garanl dc l'identité numérique dc chaque citoyen, noie encoi e le président Ilves. Cela va de pair avec une préservation des données: chez nous, vous pouvez accéder à tout ce qui vous concerne, mais les représentants de l'Etat doivent avoir une bonne raison de consulter vos données. Si un policier se met à fouiller dans votre vie privée en dehors d'un cadre juridique, il sera très vite repéré et sanctionné.» Un système tellement bien rodé que l'Estonie s'apprête à exporter (gratuitement) son superlogiciel de gestion administrative et gouvernementale. « Notre contribution aux démocraties émergentes ». s'amuse Toomas Hendrik Ilves.